Utiliser Apple Music en magasin?

Une possibilité pour les pros ?

Peut-on utiliser Apple Music dans un restaurant, un bar, un magasin ? Réponse.

Il est tentant d’utiliser Apple Music©  dans son magasin, son restaurant, ou son bar. Les avantages de la solution de la marque à la pomme sont nombreux. Examinons-les un par un.

50 millions de morceaux


 

D’abord, le nombre de chansons.

Le site Apple©  nous le dit « Ecoutez 50 millions de morceaux en streaming sans publicité ».

50 millions de chansons

Enfin, ça c’est sur le site français. Sur la version internationale du site (prix en dollars), on indique 45 millions de morceaux. 45, 50, c’est vrai que c’est une différence de 5 millions de titres. Donc tout cela est un peu approximatif. A vrai dire, on n’a aucun moyen de savoir combien il y a de titres chez Apple Music©.

Mais est-ce que le nombre de titres est si important que cela ? Si on considère qu’un titre fait en moyenne 3 minutes 30, cela signifie qu’on écoute environ 17,14 titres par heure. Si votre magasin, votre café ou votre restaurant reste ouvert 20 heures par jour (ce qui est rare) vous aurez donc à diffuser 343 morceaux par jour. Vous êtes ouvert tous les jours de l’année, sans jamais prendre de vacances ? OK. Il vous faudra donc diffuser 125 000 morceaux par an.

Bien évidemment, certains morceaux seront joués plusieurs fois : les tubes, les titres qui correspondent à l’ambiance précise que vous voulez dans votre magasin. Donc dans la pratique, même avec des heures de travail aussi importantes, vous n’aurez jamais besoin de 125 000 titres différents. Mais pour la joie du calcul, admettons que tous les titres doivent être différents. Combien d’années pour diffuser 1 million de titres différents ? Le calcul est simple. 7,98 années, disons 8 ans pour arrondir.

1 million de titres en 8 ans.

Donc pour diffuser 50 millions de titres en jouant 20 heures par jour, 7 jours sur 7, 12 mois sur 12, il vous faudra 50×8 c’est à dire 400 ans.

400 ans pour 50 millions de titres.

A partir de là, peut-on dire qu’avec Apple Music© vous allez pouvoir écouter 50 millions de morceaux en streaming sans publicité ? Non, évidemment, sauf si vous écoutez 10000 titres en même temps.

Pour résumer, le nombre de titres en millions n’est pas un argument.

La réalité c’est que rare sont les commerces qui diffusent de la musique plus de 10 heures par jour,  soit 171 titres.

Rares sont les commerces ouverts plus de 6 jours sur 7, et 6 jours donnent  1026 titres par semaine.

Une bonne partie de ces titres sont les mêmes d’une semaine à l’autre, disons au moins 30% parce que sinon votre établissement n’aura jamais de style musical particulier, mais juste un ensemble de rock, hard-rock, bossa, métal, jazz, fusion, électro, dance, pop, lounge, latino, EDM etc sans aucune cohérence. Bref d’une semaine à une autre d’un mois à l’autre vous allez retrouver un bon nombre de titres qui permettent de dessiner une ambiance musicale.

La réalité, c’est qu’on a besoin de 1500, 2000 peut-être 3000 titres dans les cas les plus larges. Cela, c’est la vérité du retail.

Des playlists faciles à faire


 

playlist pour restaurantQuand on est connecté à Apple Music© , on peut soit se créer ses propres playlists, ce qui prend du temps et demande de l’expertise musicale, soit utiliser les playlists proposées par le système. La plupart du temps on prendra cette seconde option, parce que faut-il se le cacher quand on travaille dans un commerce ou un café, on n’a pas vraiment le temps de jouer les DJs.

Alors est-ce vraiment un avantage de la marque à la pomme? Pas si sûr. Les playlists d’Apple correspondent à une ambiance, mais pour savoir si c’est l’ambiance que vous voulez dans votre établissement il va falloir les écouter. Si ce n’est pas adapté, hop, vous changez. Ce n’est pas très compliqué, mais cela prend du temps. Théoriquement vous avez autre chose à faire que de vous occuper de gérer la musique.  Les solutions professionnelles de musique pour restaurant ou pour commerce proposent des playlists adaptées à votre métier, à votre commerce avec un ciblage précis sur votre clientèle. Les playlists se font tout seul, c’est quand même beaucoup plus pratique.

En outre, le problème c’est que le système ne démarre pas tout seul. Il faut allumer votre ipad, votre ipod ou votre ordinateur, et déclencher les playlists, en changer etc. Pour certains ce n’est pas un problème, mais la réalité là encore est que dans un commerce on a mieux à faire que de jouer les DJ.  Les systèmes d’ambiance musicale professionnels comme Music Admix se mettent en route automatiquement pendant les heures d’ouverture, et s’éteignent automatiquement lorsque le point de vente ferme.  Donc ici le second avantage de la marque californienne n’est est en réalité pas un pour un professionnel du commerce.

Un prix vraiment pas cher


 

Reconnaissons-le, le prix est un avantage majeur de la solution Apple Music©  : si l’on est étudiant, c’est 4,99 euros par mois. Un individuel paiera 9,99 euros par mois, et une famille 14,99 euros par mois.

Attendez une seconde… Etudiant; individuel, famille… Aucun de ces trois termes ne fait référence à l’univers du commerce, du retail, de la restauration… Comment cela se fait-il ?

Pour le savoir, il faut se plonger dans les conditions juridiques de la marque à la pomme. Pour trouver la bonne page, il faut surfer à travers un certain nombre de rubriques, mais on finit par y arriver. La page suivante https://www.apple.com/fr/legal/internet-services/itunes/fr/terms.html vous donnera toutes les informations utiles.

Deux éléments sont à noter :

1- Vous pouvez utiliser les services et le contenu uniquement à des fins personnelles et non-commerciales.

2- Toute autre utilisation des services et du contenu constitue un manquement grave au présent contrat.

Et pour faire bonne mesure, ajoutons-y un troisième, que l’on trouver dans le paragraphe relatif à la propriété intellectuelle :

3- Vous acceptez que les services (…) contiennent des informations et éléments (…) qui sont protégés par les lois relatives à la propriété intellectuelle et autres, y compris, notamment le droit d’auteur et les droits voisins. Vous acceptez de n’utiliser ces informations ou éléments protégés que dans le cadre de l’utilisation des services, conformément aux dispositions du présent contrat, à des fins personnelles et non-commerciales. 

« à des fins personnelles et non-commerciales. » 

Voilà qui est assez clair. L’utilisation du service Apple Music©  n’est autorisé que dans un cadre personnel non commercial.

C’est d’ailleurs ce qui explique que le prix soit si peu élevé : la diffusion musicale dans le cadre familial ne contient pas les droits musicaux qui sont dûs lors d’une diffusion publique. Si vous diffusez de la musique dans votre commerce; votre hotel, votre salle de gym, ce n’est pas de l’exploitation familiale et vous devez payer les droits de diffusion publique.

Mais vous payez pourtant la SACEM !


 

C’est ici que survient la question que l’on entend le plus souvent « Je paie pourtant déjà la SACEM, pourquoi n’ai-je pas le droit d’utiliser un service comme Apple Music© ? »

La réponse est en deux parties.

D’abord, parce que votre contrat avec Apple© vous l’interdit. La marque à la pomme ne vous autorise pas à utiliser le service à des fins commerciales. Point. D’un point de vue légal il n’y a pas à parler de SACEM ou pas : vous signez un contrat pour un usage personnel. C’est tout. Pas de discussion, pas de contestation. Si vous utilisez tout de même la solution dans votre établissement, vous ne respectez pas le contrat. Que peut-il se passer quand on ne respect pas un contrat ? Demandez à votre avocat.

« Oui mais quand même je paie la SACEM ».

Redevance sur la diffusion de musique dans un commerceCeci est la seconde partie, que l’on ne devrait pas aborder tant la première partie nous paraît évidente. Pour le plaisir d’un peu plus de lecture juridique, vous pouvez vous rendre sur cette page https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F3094 qui vous explique le principe des droits.  Citons le premier paragraphe « Les commerces qui souhaitent diffuser de la musique de sonorisation doivent obtenir l’autorisation préalable des auteurs et régler des droits d’auteur. Parallèlement, l’utilisation de supports enregistrés donne lieu à une rémunération annuelle des artistes-interprètes et producteurs, déterminée de façon forfaitaire en fonction du type d’activité et de l’importance des établissements. »

Vous lirez sur cette page que « La Sacem conclut un contrat qui prévoit qu’en contrepartie des droits versés, l’exploitant peut diffuser à volonté le répertoire géré par la Sacem. « 

Le répertoire géré par la Sacem. 

Le répertoire de la SacemLorsque vous utilisez un service en ligne, toutes les oeuvres diffusées ne sont pas forcément gérés par la SACEM. Pour chaque chanson diffusée, vous allez devoir aller sur https://repertoire.sacem.fr/ et rentrer la chanson dans la case indiquée. Si elle n’est pas gérée par la SACEM, vous devrez prendre contact avec les ayants-droits et négocier directement. Il s’agit généralement des maisons de disque, ce qu’on appelle les « majors ». Bon courage.

« Et si je diffuse quand même de la musique sans savoir si elle appartient au répertoire de la Sacem »?

La réponse est simple. Dans ce cas cela signifie que vous acceptez de diffuser de la musique protégée par les droits d’auteurs, sans autorisation. Que dit la loi à ce sujet déjà? « Le fait de diffuser de la musique protégée sans autorisation constitue un délit de contrefaçon, puni de 3 ans d’emprisonnement et 300 000 € d’amende. »

Bref, les personnes qui utilisent Apple Music sont en rupture avec le contrat qui les lie avec Apple, et en infraction avec la loi. Notre conseil est simple : pour éviter les soucis, passez pas une solution de radio d’ambiance professionnelle !